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Le corbeau et le rossignol

Le corbeau et le rossignol Le corbeau et le rossignol Un corbeau invita sur sa branche Un rossignol qui donnait de la voix. Heureux de se découvrir cette alliance, Le rossignol chanta sans défiance. Mon chant séduit par delà ces forêts, Dit le gros bec, croassant sans arrêt : J’investis, j’orchestre, je prolifère. Avec moi, tu feras des affaires. Mon chant est précis, le timbre subtil, Répondit le petit, d’une note habile. J’invente, j’initie et j’inspire : J’offre la nouveauté, je suis l’avenir. Agacé, le corbeau prend ombrage, Et les partitions comme le fromage, Il s’en veut faire le propriétaire Et cherche à réduire l’autre à se taire. Rossignol émet un air de rage. Il fait tant qu’il pousse à l’arbitrage. Un âne promène ici son harnachement, Il saurait dire quel est le meilleur chant. Cependant, dans un élan de raison, Rossignol en appelle à la médiation. Une corneille désignée jette l’éponge, Incompétente face à l’émotion qui ronge. Les oreilles dressées, l’âne saurait juger. Au plus gros, il donne la légitimité Et le plus petit est disqualifié : C’est le corbeau, affirme l’équidé. Alors, le rossignol est abattu. Parce que, dit l’âne, tu as perdu. Non, dit le rossignol, c’est catastrophique, En plus, d’être jugé par une bourrique.
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3 mystifications en formation managériale : Maslow, Karpman, Kubler-Ross

Dans le domaine des formations managériales, certaines représentations sont admises comme allant de soi. Elles sont enseignées et relayées, parfois sans discernement, tant par les consultants que par les enseignants issus des grandes écoles. Ces modèles bénéficient d’un crédit intellectuel largement usurpé, faute d’évaluation critique rigoureuse.

Ayant moi-même contribué à diffuser certains de ces concepts, je mesure aujourd’hui combien leur usage s’est opéré sans réelle vérification méthodologique. Quelques formateurs prudents soulignaient leur statut non scientifique, mais l’ensemble repose sur un flou théorique entretenu par une tolérance excessive à l’égard de l’imprécision. Le rejet de la rationalité argumentée, souvent au nom de l’« ouverture d’esprit », a laissé place à une forme d’éclectisme permissif dans lequel toute critique méthodique est disqualifiée.

Je propose ici une analyse de trois modèles particulièrement problématiques.

1. La courbe du deuil (Elisabeth Kübler-Ross)

Initialement conçue pour décrire les réactions psychologiques de personnes confrontées à l’annonce d’une maladie incurable, cette courbe a été transposée, sans fondement, aux situations de changement en entreprise. Cette généralisation abusive repose sur un glissement conceptuel majeur : assimiler une annonce de décès à un changement organisationnel. En cela, elle constitue une rationalisation a posteriori de la résistance au changement.

La critique principale tient à l’absence de validité empirique dans cette transposition. Il n’existe aucun protocole de vérification démontrant que les étapes supposées du deuil s’appliquent aux transformations professionnelles. L’argument devient alors circulaire : toute réticence est interprétée comme un signe d’entrée dans la “courbe du deuil”, justifiant dès lors des pratiques managériales normatives voire manipulatrices.

2. La pyramide des besoins (Abraham Maslow)

Présentée comme une hiérarchisation universelle des besoins humains, cette pyramide repose sur une modélisation ethnocentrée, fortement influencée par un contexte socioculturel particulier, en l’occurrence celui de l’Amérique protestante du XXe siècle.

Or, les besoins humains ne suivent pas nécessairement une hiérarchie linéaire. Leur ressenti, leur ordre d’apparition et leur interaction varient fortement selon les cultures, les situations et les individus. De nombreuses études anthropologiques et sociologiques l’ont démontré. La représentation pyramidale fige des processus adaptatifs complexes dans un modèle simplificateur, devenu obsolète et trompeur, y compris dans son pays d’origine.

3. Le triangle dramatique (Stephen Karpman)

Ce modèle postule l’existence de rôles fixes — victime, persécuteur, sauveur — dans les interactions conflictuelles. Il est largement utilisé dans les formations en communication et en prévention des risques psychosociaux, souvent sans mise en perspective critique.

Pourtant, ce modèle repose sur une lecture essentialiste et psychologisante des comportements relationnels, sans base empirique solide. Il simplifie à l’extrême la dynamique des interactions et favorise des interprétations projectives, sujettes à de nombreux biais. L’assignation de rôles préétablis, sur la base d’indices comportementaux flous, conduit à des dérives interprétatives et à une méfiance systémique, peu compatible avec une approche rigoureuse de la relation humaine.

Conclusion

Ces trois modèles partagent plusieurs traits communs :

  • Une absence de validation scientifique probante.

  • Une facilité de diffusion liée à leur apparente simplicité.

  • Une fonction normative masquée sous des prétentions explicatives.

Ils relèvent davantage de constructions idéologiques que d’outils méthodologiques, sinon de biais de temporalité contextuelle. Leur usage massif en formation managériale devrait être reconsidéré à l’aune de critères de validité, de falsifiabilité et de transférabilité contextuelle. En l’état, leur perpétuation contribue à une confusion entre savoirs établis et croyances populaires.

http://youtu.be/C6se-k0G_TA Ces trois leurres présentées comme des vérités dans la plupart des formations au management sont des hontes intellectuelles. Elles sont absurdes, et mêmes ridicules. Maintenant que l'on a un peu avancé dans la qualité du raisonnement. il serait temps que les consultants et formateurs s'actualisent et cessent de les véhiculer.
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