Procès Chirac, procès politique…

Procès Chirac, procès politique…

Le compagnon Pasqua

Avec les procès contre Charles Pasqua, le ministre de l’intérieur français qui détient un record pour les affaires, les poursuites en justice, les comparutions devant des juges d’instruction et les condamnations, c’est le tour de Jacques Chirac à devoir rendre quelques comptes devant les tribunaux qu’il a réussi à contourner jusqu’à maintenant. Le système d’influence est justement au cœur du débat et c’est lui qui dans cette affaire se débat. A y regarder de prêt, la mise en cause de l’ancien maire de Paris et président de la République française peut paraître badine. Comparer aux affaires Pasqua, que ça ! des combines.  Des arrangements entre copains pour augmenter les revenus en créant des postes sans rien faire. Autrement dit, des emplois fictifs qui ont bien intéressés des élus encore en exercices.

Sur fond d’affaire Juppé

C’est dans ce bain de trafic d’influence et de financement occulte du parti RPR devenu UMP, que l’actuel ministre des affaires étrangères a trempé. Pour ces méfaits, Alain Juppé a bénéficié en appel de la clémence judiciaire. Il a été condamné à un an d’inéligibilité. A peine terminé, il se précipitait à Bordeaux, renversait le conseil municipal et se réinstallait sur le siège du Maire. Pourtant, en première instance, les juges avaient été clairs : « Alain Juppé […] a délibérément fait le choix d’une certaine efficacité en recourant à des arrangements illégaux […]  la nature des faits commis est […] contraire à la volonté générale exprimée par la loi ; qu’agissant ainsi, Alain Juppé a, alors qu’il était investi d’un mandat électif public, trompé la confiance du peuple souverain. […] ». Condamnation : 18 mois de prison avec sursis et 10 ans d’inéligibilité.

En appel, l’embarras des juges était lisible : « Il est regrettable qu’au moment où le législateur prenait conscience de la nécessité de mettre fin à des pratiques délictueuses […] , M. Juppé n’ait pas appliqué à son propre parti les règles qu’il avait votées au parlement. Il est également regrettable que M. Juppé  […] ait maintenu la négation de faits avérés. Toutefois, M. Juppé s’est consacré pendant de nombreuses années au service de l’État, n’a tiré aucun enrichissement personnel de ces infractions commises au bénéfice de l’ensemble des membres de son parti, dont il ne doit pas être le bouc émissaire. »

A cette occasion, le juge préférait fermer les yeux sur le fait que l’intéressé et ses acolytes ont bénéficié sans détour des fonds publics détournés. Ils ont organisé à leur profit des réunions, des repas, des soirées, payé des locaux politiques, financé des campagnes, pour finalement atteindre l’objectif d’être élus et percevoir les rémunérations afférentes aux fonctions qu’ils ont ainsi obtenues.

L’espoir existe d’un système judiciaire indépendant

A voir la situation et les personnes impliquées, comme Jean De Gaulle, petit fils du général, François Debré, frère du président du Conseil constitutionnel, l’épouse de Robert Poujade, il est évident que les personnes se jouent du système. Comment condamner un ancien président de la république ? N’a-t-il pas été élu grâce aux moyens récoltés illégalement ? L’Histoire ne se refait pas . Elle sera entachée de la corruption manifeste.

Toutefois, ne pas faire ce procès, n’est-ce pas encore une fois prendre le risque d’ajouter au discrédit de la classe politique et de la main mise sur le système judiciaire ?

A la lumière de ce qui se passe en ce moment, on comprend pourquoi, à titre préventif, l’actuel président de la république a tenté de faire disparaître le système des juges d’instruction. L’échec de cette tentative témoigne qu’il existe bien un espoir quant au fonctionnement sain de cette organisation sociale. Un espoir, car les injustices sont criantes, tandis que le pouvoir politique tente d’attirer l’attention des électeurs sur les affaires de mœurs. Ce détournement de l’attention n’a pas d’autre but que de faire monter le sentiment d’insécurité, tandis que les affaires sont classées par une justice emportée par les groupements d’intérêts politiques.

Comme dans l’affaire Tapie, les plus démunis sont les perdants

Quelle que soit la date du procès concernant cette affaire, l’éventuel décès de Chirac n’empêchera pas la poursuite de ses co-inculpés et les sanctions, le cas échéant, pourraient bien être à l’image du premier procès Juppé. Ce qu’il faut bien retenir, c’est l’injustice flagrante qui est ressentie par le plus grand nombre des concitoyens. La qualification même de la fraude apparaît inéquitable. Cet argent détourné ne l’a-t-il pas été pour permettre aux bénéficiaires de se maintenir dans des fonctions ? Ne leur a-t-il pas permis d’obtenir d’autres fonctions, encore plus importantes et rémunératrices et de poursuivre en utilisant cet ascenseur social ? Cet argent n’a-t-il pas été détourné au détriment des plus pauvres d’entre les Français ? Certains d’entre eux n’ont-ils pas simultanément à ces détournements de fonds publics été accusés outrageusement d’abuser du système de solidarité ?

A chaque fois que l’argent est pris indument dans les caisses des collectivités publiques, c’est autant d’argent en moins pour les actions de solidarité. Ce sont les plus nécessiteux qui en pâtissent. Et, sans paradoxe, ce sont eux qui sont mis à l’index par les auteurs des abus de bien sociaux. Alors, dans ces affaires, le remboursement de l’argent public devrait a minima être la règle.

Évidemment, le système judiciaire est là pour rendre les décisions au nom du peuple français. Le problème est que certains trouvent les moyens légaux ou illégaux, on l’a vu dans l’affaire Tapie, d’empêcher le système judiciaire d’agir. On pourrait s’attendre à ce qu’il applique la loi de manière aussi équitable envers tous les citoyens, de quelle couche sociale qu’il provienne. Ainsi une partie de la confiance dont les Français ont besoin envers leurs institutions pourrait être rétablie.

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